Dans son livre " Après Dieu", Richard Malka, qui n'a certainement pas envie de coloniser la planète Mars comme l'envisage Elon Musk, se pose la question de la transcendance qui doit encore nous animer sur Terre puisque les religions elles-mêmes sont suspectes en raison de leur intolérance ou radicalité connues ou passées. Car, elles sont instrumentalisées, aussi et hélas, pour servir des finalités politiques et de pouvoir mortifères. Mais, tout cela nous ne le savons que trop bien. Et ce qui doit être défendus dans la foi, comme pour les lois votées par une société libre et démocratique, ce sont les textes que l'on considère comme sacrés et qui ne devraient être détournés par aucune autorité morale ou légale. La religion est dangereuse, non par les textes sur lesquels elle se fonde, mais par l'usage inapproprié ou abusif que certains mauvais prêcheurs ou imposteurs de tout poil en font. Et ne pas faire cette distinction, c'est accepter le jeu des nihilistes qui ruinent tout effort visant à préserver ces valeurs humanistes et universelles qui pourtant sont le socle commun de tous les textes religieux (lire l'article: Nihilisme/relativisme, la revanche des ignorants ou des inconscients). Il en va de même de la critique: Il ne viendrait l'idée à aucun caricaturiste de se moquer de la crucifixion du Christ ou de rire de l'holocauste des juifs. Mais, si le pape ordonne l'interdiction du préservatif en pleine pandémie du SIDA, il est légitime dans une société laïque de critiquer une décision aussi irresponsable, n'en déplaise à sa Sainteté. La seule transcendance qui me paraît digne d'intérêt est celle de se battre pour des valeurs universelles communes à tous les peuples telle que l'éthique de réciprocité, et non des moindres, qui dicte d'abord de ne pas infliger à nos semblables le Mal que nous n'accepterions pas de souffrir pour nous-mêmes (lire l'article : "Aime ton prochain comme toi-même!"). Mais, aussi, que la Terre qui est notre seul habitat dans cet Univers soit préservée le plus longtemps possible de cet irrépressible instinct de prédation qui caractérise les puissants de ce monde, comparable au comportement de ces sauterelles qui s'attaquèrent naguère à la civilisation égyptienne (Exode 10:13-14,19).
À défaut d'une religion, Richard Malka suggère donc qu'une transcendance pourrait être trouvée dans l'épicurisme ou l'hédonisme qui prônent comme conduite de vie la recherche du plaisir et l'évitement de la souffrance. Cependant, ces philosophies se réfèrent plus à une approche individualiste et donc une forme d'immanence liée à notre être qu'à des valeurs supérieures qui font société et nous surpassent dans le temps et l'espace. Enfin, s'agissant de l'agnosticisme, si ce courant de pensée fut parfaitement légitime dans l'histoire humaine, notamment lorsque le principe de laïcité n'était pas encore en vigueur et que la religion était omnipotente, je ne vois pas quelle transcendance peut-on en tirer aujourd'hui, si ce n'est d'adopter des postures couardes, snobinardes ou délibérément mystificatrices ? En effet, tous ces doutes d'autrefois n'ont plus cours, soit que la science les a effacés, soit que le raisonnement méthodique et rationnel dont nous sommes capables a en grande partie résolu les questions soulevées, comme celles de l'existence de Dieu ou de l'Après-vie. De Dieu, s'il existe (sur un plan cosmique et/ou quantique), nous pressentons au moins depuis l'Antiquité qu'il n'intervient en rien dans la marche du monde et qu'il est donc indifférent au Mal ou au Bien que les hommes choisissent délibérément de se faire entre eux. Tout au plus, la croyance en un Dieu sur Terre et dans nos lieux de culte n'a de sens véritable que pour consoler les malheureux et les déshérités que ce monde ne cessent d'engendrer, et donc pour conjurer le Diable et ses suppôts en répandant inlassablement la bonne parole. Quant à la mort, je ne résiste pas à citer les propos récemment tenus par le 1er ministre français François Bayrou : «J'ai souvent dit que pour moi la mort n'existait pas. Au risque de livrer des convictions trop franches, je crois que la vie ne s'interrompt pas et que ceux qui sont de l'autre côté continuent d'avoir avec nous des relations qui nous influencent.» Un autre François (Mitterrand) l'avait également évoqué laconiquement le 31 décembre 1994 à l'occasion de ses derniers vœux, sentant sa fin toute proche : «Je crois aux forces de l'esprit. Et je ne vous quitterai pas.» (lire l'article: Que se passe t-il après la mort ?) Et pour conclure, permettez-moi de vous offrir ces quelques quatrains inédits et personnels que m'a inspiré la rédaction de cet article et que j'ai intitulés "Entre la tombe et le berceau" !
Du berceau à la tombe,
Combien de mystificateurs ?
Dans cette vallée des ombres
Console-moi, ô mon âme sœur !
De tous ces destins forgés,
Issus d'improbables amours,
Espèrent tant et persuader,
Mais ne réalisent si peu en retour.
Pourvu que dans cet élan vital,
Naisse ce besoin d'éternité,
Et dans la folle ronde du bal,
De nouvelles amours soient nées,
Alors, ces éphémères unions,
Viendront combler au plus haut,
Cet abîme de désillusions,
Entre la tombe et le berceau.
Plus haut (version 2004)
S'il faut encore rendre hommage à la paire magique que formèrent le pygmalion Michel Berger et sa muse France Gall, cela ne peut se faire sans exhumer une petite merveille tombée dans l'oubli depuis 1980 et intitulée "Plus haut". À l'époque, la chanson interprétée par France Gall fut orchestrée très différemment de la version remastérisée en 2004 qui, ayant pris le temps de mûrir, est parvenue à une grâce inégalée. À tel point que dans ces dernières interviews, France Gall reconnaissait que ce titre était devenu, parmi son vaste répertoire, celui qu'elle chérissait le plus. Dans les années quatre-vingt-dix, elle a même tenté de réaliser un clip avec Jean-Luc Godard qu'elle considérait comme un grand cinéaste.
Hommage à Gene Hackman
L'acteur Gene Hackman et son épouse musicienne Betsy Arakawa ont été retrouvés décédés récemment dans des circonstances considérées par la police comme suspectes. Gene Hackman fut nommé cinq fois aux cérémonies des Oscars. Il reçut celui du meilleur acteur en 1971 pour «French Connection». Ces rôles principaux étaient si puissants qu'il fit gagner deux Palmes d'Or consécutives au Festival de Cannes pour «L'épouvantail» en 1973 et «Conversation secrète». Ci-dessous, on le retrouve dans un de ses rôles les plus engagés dans «Mississippi Burning» d'Alan Parker sorti en 1988 et qui fait la fresque d'une Amérique divisée (cela n'a pas beaucoup changé depuis) sur fond de racisme anti Afro-Américains, tels ces sordides réminiscences de la Guerre de Sécession, directement adaptée d'un fait divers relatant l'inquiétante disparition en 1964 de trois militants pour la défense des droits civiques après s'être rendus dans un État du sud, Le Mississippi, dans le comté de Jessup. Quelques mois après l'assassinat de JFK, le FBI prend l'affaire très au sérieux et dépêche une équipe d'enquêteurs dirigés par Alan Ward (Willem Dafoe) jouant le rôle du "good cop" aux côtés de Rupert Anderson (Gene Hackman) dans celui du "bad cop". Car, l'enquête dès le début s'avère difficile et se heurte au mutisme de la population et surtout à l'hostilité des autorités locales qui, contrairement à Abraham Lincoln, n'ont toujours pas renoncé à leurs idéologies racistes et continuent de faire vivre le Ku Klux Klan en enflammant des croix chrétiennes pour se draper d'une soi-disant légitimité religieuse et semer ainsi haine, terreur et violence. Assurément que ce fond historique permet à lui seul de comprendre pourquoi une majorité d'Américains a pu donner une seconde fois son suffrage à un personnage comme Donald Trump, événement politique qui paraît encore (mais pour combien de temps ?) impensable en Europe.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
N'hésitez pas à laisser un commentaire, de préférence non anonyme ! Merci de votre compréhension !